Apparition de nouveaux virus tropicaux en Aquitaine : lien avec le changement climatique et les moustiques

Lounes

Pendant l'été, la présence de deux nouveaux virus transmis par des moustiques a été détectée en Nouvelle-Aquitaine. Anna-Bella Failloux, des moustiques, explique les raisons de la multiplication et de la propagation de ces virus.

Les premiers cas humains autochtones de contamination par des moustiques Culex, endémiques en France, sont apparus dans le sud-ouest cet été. Jusqu'au 4 septembre, huit cas de virus du Nil et quatre cas de virus Usutu ont été recensés en Gironde. Le bilan épidémiologique révèle également des cas importés de dengue.

Est-il nécessaire de s'inquiéter de la généralisation de ces virus en France dans les années à venir ? Comment expliquer cela ? Peut-on ralentir ou inverser cette tendance ? Anna-Bella Failloux, entomologiste à l'Institut Pasteur, spécialiste des moustiques, nous éclaire sur ces questions.

Anna-Bella Failloux explique que notre système de détection est de plus en plus précis, ce qui explique l'augmentation du nombre de cas recensés, forcément signifier qu'il y en a plus. Cependant, il est certain que le changement climatique et les activités humaines favorisent de plus en plus la multiplication des moustiques et donc la transmission des virus.

L'activité humaine joue un important dans ce phénomène. À l'origine, ces virus circulaient seulement dans un cycle sauvage et étaient transportés par des moustiques zoophiles qui piquent uniquement les animaux. Cependant, la déforestation a modifié le comportement des animaux sauvages et des moustiques, qui ont commencé à piquer les humains et à leur transmettre ces virus. Une fois arrivés en , ces virus sont ensuite transmis par des moustiques qui piquent uniquement les humains.

Le réchauffement climatique accentue la circulation de ces virus, car le moustique est un animal à sang froid. En effet, une augmentation de la température extérieure favorise la multiplication des virus dans le corps du moustique, atteignant plus rapidement ses glandes salivaires et sa salive.

Les opérations de démoustication sont efficaces pour contenir une épidémie, mais elles ont des impacts néfastes sur l'environnement. En effet, une seule molécule insecticide est autorisée, ce qui conduit les moustiques à développer une résistance à cette molécule, nécessitant donc l'augmentation des doses pour être efficace.

Des alternatives existent, comme l'introduction de la bactérie Wolbachia dans les moustiques du type Aedes aegypti. Cette bactérie agit comme un agent pathogène et empêche le moustique de transmettre le virus. Cependant, cette méthode est coûteuse et nécessite la mise en place d' à moustiques et de lâchers massifs pour transmettre la bactérie à leur descendance.

Il est peu probable que les transmissions de virus du moustique à l'humain disparaissent complètement. En effet, il existe environ 3 500 espèces de moustiques dans le monde et la pression démographique humaine augmente constamment. De plus, avec le changement climatique, de nouvelles zoonoses sont susceptibles d'apparaître.

Pour anticiper ce phénomène, les équipes de recherche travaillent sur de nouvelles solutions, telles que le développement de nouvelles molécules insecticides, de nouvelles bactéries et de vaccins. Il est également important de mener une éducation sanitaire pour éliminer les gîtes larvaires de moustiques, comme les récipients d'eau laissés à l'abandon à l'extérieur. Anna-Bella Failloux étudie également le fonctionnement de l'immunité des moustiques pour mieux comprendre comment ils transmettent les virus et comment empêcher cette transmission.

En conclusion, il est primordial de prendre des mesures pour limiter la propagation de ces virus transmis par les moustiques, en en compte les impacts du changement climatique et des activités humaines.