Jeune femme accouche en voiture près d’une maternité fermée

Lounes

Depuis la suspension de l'activité de la maternité de Ganges, les futurs parents du nord de l'Hérault et des Cévennes doivent maintenant parcourir plus d'une heure de route pour accoucher à Montpellier ou à Nîmes. Cette situation pose un risque, car certains bébés risquent de naître en chemin. C'est ce qui est arrivé à une famille du village de Mandagout.

Audrey et Maël se souviendront longtemps de la du 10 août 2023. Ce jour-là, ce jeune couple, qui habite dans le village de Mandagout, près du Vigan dans le Gard, attendait la naissance de leur troisième enfant. Normalement, cet enfant aurait dû naître à la maternité de Ganges, qui se trouve à moins d'une demi-heure de route.

Mais voilà, la mauvaise nouvelle est tombée l'hiver dernier : la polyclinique de Ganges, qui n'avait pas à trouver de gynécologues-obstétriciens pour remplacer trois départs, a annoncé qu'elle ne pouvait plus assurer les accouchements. Le 19 décembre 2022, l'Agence régionale de santé a donc officiellement fermé la maternité de la polyclinique Saint-Louis de Ganges.

Ainsi, lorsque les contractions ont commencé, Maël et sa compagne ont dû rapidement charger la voiture avec une couverture de survie et du matériel pour les premiers soins, se rendre à l'hôpital le plus : l'hôpital Arnaud de Villeneuve, situé au nord de Montpellier, à environ 50 kilomètres de chez eux.

Cependant, alors qu'il ne restait que dix minutes de route jusqu'à la maternité de Montpellier, ils ont dû arrêter la voiture en bord de route aux Matelles, car la petite Zélia a décidé que c'était le moment de naître. Audrey, la maman, raconte : « J'ai perdu les eaux sur la première poussée dans la voiture et les événements se sont enchaînés : on sent que ça arrive, on s'imagine pouvoir retenir les forces de la nature mais ce n'est pas possible ! Donc, on sent bien que ça va se passer là, sous notre propre , et pas avec l'appui d'une équipe médicale. »

Audrey n'a pas eu peur sur le moment, mais elle s'inquiétait plutôt des complications possibles lors de l'accouchement : « J'avais peur des déchirements et de tout ce qui peut arriver, qu'on ne maîtrise pas et qu'on ne connaît pas lors d'un accouchement. » Sur le trajet, Maël a appelé les pompiers et le Samu, mais comprenant que l'ambulance n'arriverait pas à , il a pris la décision de continuer à rouler le plus vite possible vers l'hôpital montpelliérain : « Soit je m'arrêtais pour attendre les pompiers, qui ne sont pas obstétriciens ou sages-femmes, pendant 25 à 35 minutes et là, il aurait pu se passer plein de choses. Soit on continue à rouler. J'ai choisi de foncer mais la petite est arrivée. Elle est sortie facilement, je l'ai juste réceptionnée et on l'a séchée. Puis, on a tracé et on est arrivé à l'hôpital avec l'enfant qui allait très bien et qui était au sein. Mais il y a des fois où ça ne se passe pas comme ça, des accouchements qui sont plus difficiles que d'autres, et c'est quand même un gros danger ! »

Maël, le papa, souhaite maintenant pousser un coup de gueule : « Parce que, pour nous, ça s'est bien passé et quand on y repense, on est heureux, mais c'est vrai que cela reste un danger, un accouchement ! Et être accompagné par une équipe médicale dans ce cas-là, c'est le minimum des choses en France ! »

Le maire de Mandagout, Emanuel Grieu, partage la colère du couple : « C'est ce qu'on craignait qui est arrivé avec cette fermeture brutale, annoncée en septembre 2022. On s'est tout de inquiété de la distance : pour les villages les plus éloignés dans nos territoires, c'est même deux heures de route pour une maternité ! On met en jeu la vie des mamans et de leurs enfants, ce n'est pas acceptable. » Pour lui, il est primordial de continuer à défendre les services publics de proximité et espère pouvoir maintenir un dialogue constant avec l'Agence régionale de santé.

Cependant, l'ARS ne voit pas les choses de la même manière et affirme que la maternité de Ganges n'est pas fermée. Selon Didier Jaffre, le directeur général de l'ARS Occitanie, « la maternité est toujours ouverte à la clinique de Ganges, mais seuls les accouchements ne s'y font pas. Au sein de la maternité, nous avons mis en place un centre périnatal qui permet d'assurer le suivi des grossesses en lien avec le CHU de Montpellier. » Selon lui, il n'y a aucun danger car tout est protocolisé et préparé, et la maman est prise en charge depuis le début de sa grossesse et sait qu'elle doit se rendre à Montpellier pour accoucher.

L'ARS a récemment annoncé la création d'une nouvelle clinique pour remplacer la maternité de Ganges. L'État doit apporter son soutien financier à hauteur de 11 millions d'euros pour ce projet, qui devrait voir le jour en 2025. Le maire de Mandagout attend de voir cette clinique se concrétiser avant de se réjouir.