Des Ibis chauves ont entrepris un voyage depuis l'Allemagne jusqu'en Espagne, avec une mère de substitution humaine pour les guider à bord d'un ULM. Ils ont offert un magnifique spectacle aux passionnés venus les observer.
L'Ibis chauve est l'une des espèces d'oiseaux migrateurs les plus rares au monde, et il a réapparu dans le ciel de l'Ardèche. En cette fin du mois d'août 2023, nous avons eu la chance de le voir lors de sa migration assistée entre Hilzingen, en Allemagne, et le sud de l'Andalousie.
Ces oiseaux ont une caractéristique unique : une calvitie sur leur crâne, d'où leur nom. Ils sont des migrateurs, et certains d'entre eux sont élevés par des mères de substitution humaines, Helena Wehner et Barbara Steininger. Depuis leur naissance, ces femmes les nourrissent, les apprennent à voler et les guident à bord d'un ULM. Une véritable communication s'est établie entre elles.
Cette technique s'inspire des recherches de Konrad Lorenz sur les oies. Ce biologiste autrichien a remarqué que les oies le prenaient pour parent et le suivaient partout s'il était présent à leur naissance.
Cette année, les Ibis chauves ont quitté le lac Constance en Allemagne à la mi-août et doivent parcourir 2000 kilomètres pour rejoindre l'Andalousie où ils passeront l'hiver. Ils ont fait une escale en Ardèche, qui est le seul site en France où des fossiles d'Ibis chauves ont été découverts en 1996.
L'année dernière, en raison d'un départ tardif, seuls cinq oiseaux ont réussi à traverser le relief du massif franco-italien pour rejoindre la Toscane, leur site d'hivernage habituel. Cela a motivé le choix de l'Espagne cette année. En effet, un jeune mâle nommé Ingrid a traversé la France puis l'Espagne en 2022 pour rejoindre une colonie sédentaire en Andalousie, n'ayant pas réussi à passer les Alpes.
Malgré les efforts déployés, l'Ibis chauve reste une espèce très menacée. Dans les années 1990, elle était en voie d'extinction, et aujourd'hui, on compte seulement environ 300 individus en Europe et quelques colonies au Maroc. Les effectifs sont trop faibles pour que l'espèce puisse se rétablir seule dans le bassin méditerranéen.
Sur les 35 oiseaux qui ont pris leur envol en Allemagne, 17 se sont déjà perdus en route, ce qui témoigne des difficultés qu'ils rencontrent. Johannes Fritz, directeur du projet de sauvegarde de l'Ibis chauve et pilote de l'ULM, exprime sa préoccupation quant à la complexité de cette étape de migration. Malgré les conditions météorologiques parfaites, les oiseaux ont du mal à suivre le trajet. Une des mères a d'ailleurs quitté le groupe à la recherche de ses petits disparus, tandis que le reste de l'équipe continue son vol vers l'Andalousie.