La rentrée 2023 est marquée par un problème récurrent dans près de la moitié des établissements du secondaire : le manque de professeurs. C'est ce que révèle une étude du SNES-FSU relayée par FranceInfo. Ce phénomène concerne désormais toutes les disciplines et tous les secteurs, y compris la Champagne-Ardenne. Un enseignant syndiqué témoigne après une rentrée agitée.
Au collège Robert Schumann de Reims (Marne), où enseigne Yohann Odivart, professeur d'histoire-géographie, il manque un professeur de mathématiques en cette rentrée 2023. « Il y a quelques années, il n'était pas difficile de pourvoir un poste dans cette matière, note-t-il. Il y avait une réserve de professeurs de mathématiques. Aujourd'hui, c'est l'un des concours où il y a le plus de places non pourvues. »
Dans cet établissement proche du centre-ville de Reims, le professeur stagiaire prévu n'est finalement pas venu, ce qui a nécessité de faire appel en urgence à un personnel contractuel. Yohann Odivart espère que ce remplaçant restera toute l'année, mais il souligne le problème posé par ces personnels, qui ne sont pas titulaires et n'ont aucun engagement envers l'éducation nationale. En cas de rupture de contrat, il n'y a plus de professeur.
L'Education nationale a de plus en plus recours à ces personnels contractuels. « Le rectorat de Reims tenait même un stand à la Foire de Châlons pour essayer de recruter en urgence des professeurs, c'est quand même problématique ! » dénonce Yohann Odivart. Selon une enquête du SNES-FSU, il manque en moyenne au moins un professeur dans la moitié des établissements du secondaire en cette rentrée 2023. Ce déficit s'explique par un problème d'attrait pour le métier, qui se traduit par un nombre insuffisant de candidats aux concours de l'enseignement. En 2023, 13,7 % des postes dans le secondaire sont restés vacants, notamment dans des matières telles que les mathématiques, l'allemand, l'espagnol et les lettres classiques.
Les conséquences de cette pénurie se font ressentir sur l'organisation des emplois du temps et des apprentissages. Le recours à des personnels contractuels en urgence, quelques jours avant la rentrée, perturbe la vie des établissements. « Nous avons appris à la pré-rentrée qu'il manquait un collègue de mathématiques, souligne Yohann Odivart. Le problème est résolu pour le moment, mais cela pose de vraies questions d'organisation. » Les recrues peuvent avoir d'autres engagements ou des obligations auxquelles elles doivent répondre, ce qui implique parfois des changements dans les emplois du temps, y compris après la rentrée.
Il y a également une problématique de suivi de la scolarité et de continuité des enseignements. « Un professeur titulaire va pouvoir suivre l'élève sur plusieurs années, travailler de concert avec l'équipe pédagogique. Avec quelqu'un qui arrive à la dernière minute, il va falloir un peu de temps pour apprendre à connaître l'établissement et les collègues », explique le professeur d'histoire-géographie. Les élèves découvrent le nouvel enseignant après les autres, et ce qu'ils voient, c'est qu'il est arrivé en retard, après la rentrée, déplore Yohann Odivart.
Le phénomène du manque de professeurs touche désormais tous les territoires, y compris les grandes agglomérations. « Par le passé, c'était difficile pour les zones excentrées, comme les Ardennes, ou même le sud de la Marne, maintenant, c'est même le cas à Reims », constate Yohann Odivart.
Le gouvernement envisage différentes pistes pour résoudre ce problème, notamment en termes de salaires, surtout en début de carrière. « La vocation existe chez de nombreux enseignants, mais cela n'efface pas le fait que le plein d'essence coûte de plus en plus cher. Ça peut être un problème pour certains collègues, surtout si l'établissement est éloigné ou excentré », souligne Yohann Odivart.
Les recrutements de personnels sont de plus en plus urgents et rapides, au détriment parfois de la vérification des compétences à enseigner. « Est-ce que ce qui est important, c'est la qualité du service rendu, ou c'est de mettre à tout prix un adulte devant chaque classe d'élèves, peu importe qui est l'adulte ? » questionne le professeur.
Selon le ministre de l'Education nationale, Gabriel Attal, les personnels contractuels représentent 4 à 5% des enseignants en France.