Le secteur de l'enseignement aurait préféré que l'attention médiatique soit accordée aux enjeux de la rentrée scolaire et aux revendications de longue date plutôt qu'à la polémique politique et religieuse concernant l'abaya. Les enseignants auraient préféré discuter des programmes, du manque de moyens et du nombre d'élèves par classe.
Cependant, depuis le dimanche 27 août 2023, le ministre de l'Éducation a demandé l'interdiction de l'abaya dans les écoles publiques, invoquant le principe de la laïcité. Selon lui, ce vêtement serait un symbole religieux, bien que d'autres sources affirment que la réalité est plus ambiguë.
La rentrée des élèves est prévue pour le lundi 4 septembre, mais depuis une semaine, tout le monde ne parle que de cette polémique. Cependant, pour les syndicats enseignants, des problématiques plus importantes telles que l'attractivité de la profession et les conditions d'enseignement sont jugées plus prioritaires. C'est pourquoi France 3 Champagne-Ardenne a interrogé les enseignants à ce sujet.
Laurence Corpel, secrétaire académique de la CGT Éduc'action dans la Marne, considère cette polémique comme un contre-feu, car selon elle, peu d'établissements sont concernés par le port de l'abaya. Elle souligne que la priorité des syndicats enseignants est le manque d'enseignants en France, avec au moins 2 000 postes vacants. Elle dénonce également le manque d'attractivité de la profession et les conditions de travail précaires. Elle souligne notamment les problèmes d'organisation du baccalauréat et l'institutionnalisation des remplacements qui conduisent à une dégradation dramatique du métier.
Elle souligne également l'importance d'avoir des professeurs formés et du personnel de santé et social dans les établissements. Elle met en avant les problèmes de mal-être des élèves après la pandémie de Covid-19 et dénonce le manque de moyens pour y faire face. Elle critique enfin le mode d'action du gouvernement, qu'elle estime méprisant envers les professeurs et coupé du terrain.
Francis Gamon, secrétaire départemental du Snes-FSU dans l'Aube, estime que la priorité est d'améliorer les conditions de travail pour rendre la profession plus attractive. Il souligne les difficultés de recrutement et les conséquences sur les remplacements et la continuité pédagogique. Il propose d'inclure les remplacements dans les heures de cours des professeurs et critique les propositions impulsives du président sans connaissance réelle du fonctionnement de l'enseignement.
Il souligne également le problème du pouvoir d'achat des enseignants qui diminue depuis plusieurs années. Selon lui, les salaires sont inférieurs à ceux des professions du privé, malgré un niveau d'études équivalent. Il dénonce également le fait que ce sont les administratifs qui prennent les décisions et que l'intérêt de l'élève est parfois négligé.
Il constate également une défiance envers l'enseignement public, notamment de la part des classes sociales favorisées. Il dénonce la mise en place d'un système d'école à deux vitesses et une image dégradée de l'enseignement public.
Karine Fuselier, secrétaire départementale du Snes-FSU dans les Ardennes, souligne les enjeux laissés de côté par la médiatisation de la polémique sur l'abaya. Elle met en avant les conditions d'étude et d'apprentissage des élèves, ainsi que les conditions de travail des personnels. Elle déplore la suppression de nombreux postes ces dernières années, ce qui entraîne une augmentation de la charge de travail des enseignants et des effectifs par classe. Elle souligne également le manque de moyens pour accompagner les élèves à besoins éducatifs particuliers. Elle s'inquiète également des nouveaux dispositifs et orientations qui, selon elle, ne vont pas dans le bon sens et attaquent les fondements du service public de l'éducation.
Pour faire entendre ces revendications, des actions de mobilisation sont prévues. Les syndicats appellent à un renforcement des équipes éducatives, ainsi qu'à une reconnaissance et une prise en compte des besoins des élèves.