Squatters à Toulouse : ils ne savent pas où aller !

Lounes

À Toulouse (Haute-Garonne), les habitants d'un squat installé dans des bureaux abandonnés s'inquiètent de leur avenir après l'annonce de leur expulsion par la justice. Les associations tirent également la sonnette d'alarme quant au relogement et au suivi juridique des occupants.

Dans le squat, la nouvelle de l'expulsion se répand peu à peu. Même si aucune date précise n'a été donnée, il devra bientôt être abandonné. En début de semaine, la justice a ordonné l'évacuation du squat de -Martin-du-Touch à Toulouse. Près de 150 personnes vivent dans ces bureaux désaffectés du bâtiment Victoria Center.

Certains habitants ne cachent pas leur inquiétude. « On ne pas où aller », soupire un des occupants du squat. Arrivé en France depuis le Burkina Faso il y a sept ans, cet ancien maçon vit ici depuis deux mois. « On est inquiets, il suffit d'un simple petit contrôle, aujourd'hui, on n'est pas à l'abri. On vit avec le doute, alors qu'on n'a jamais fait, même à une mouche. On est là, on essaie de vivre comme des humains, et vraiment, on n'est pas bien. Il faut voir ce que l'État peut faire pour nous. »

« Depuis que nous sommes à Toulouse, on ne fait que squatter de gauche à droite, d'un squat à un autre squat », continue-t-il. « Si on régularisait simplement les papiers, qu'ils venaient, qu'ils comptaient les personnes qui sont là depuis des années et qu'ils donnaient un petit bout de papier comme un titre de séjour, ça améliorerait les choses. Penser à faire une autre guerre que la guerre aux sub-sahariens. »

Karina Rareg, de nationalité française, a choisi de vivre dans ce squat. Elle s'est installée ici en février dernier et témoigne : « C'est devenu une famille pour moi. » Alors qu'ils vivent au jour le jour, elle dénonce l'avis d'expulsion « injuste » qui risque de fragiliser encore plus la situation des squatteurs. « On ne leur donne pas la possibilité de travailler, d'avoir des papiers, d'être dans la légalité. On les accepte sur le sol, mais pas vraiment. Ici, il y a des familles, des gens qui travaillent, qui sont dans la légalité aussi, et ils s'en foutent de ça, ils ne nous demandent même pas notre avis. » « Moi, je suis française, je sais que ça ira », affirme-t-elle, mais elle sait que beaucoup d'autres ne sauront pas où aller après l'expulsion.

L'association Utopia56, qui aide les squatteurs de Saint-Martin-du-Touch depuis le début de l'occupation en février, partage cette inquiétude. Chaque semaine, des bénévoles et des employés proposent une permanence dans les locaux pour accompagner les habitants sur l'orientation, l'ouverture des droits, les demandes d'asile, etc. Ils assurent également le relais des informations et des communications les concernant. « Le cycle des expulsions, on y est confrontés depuis des années malheureusement, déplore Koralane Peltier, coordinatrice d'Utopia56 Toulouse. À chaque fois, cela entraîne une rupture dans le parcours scolaire de certains enfants, une interruption des suivis médicaux pour les associations, et pour nous, un arrêt dans nos suivis administratifs et juridiques. Ensuite, il faut retrouver les personnes qui se cachent parfois, qui ont peur, qui ne veulent pas dire où elles sont. Cela prend énormément de temps. »

La question du relogement est également préoccupante. Selon l'association Droit au Logement 31, les hébergements d'urgence à Toulouse sont saturés. « C'est injuste de ne pas nous donner les moyens de nous reloger, dénonce Karina Rareg. Ce n'est pas la France. Où est l'égalité, la fraternité ? Je trouve ça hallucinant qu'on les laisse, comme ça, dans l'incertitude. ‘Écoutez, on vous met dehors, et on s'en fout de savoir où vous allez aller.' » »Selon Utopia56, le squat abrite principalement des familles et des hommes seuls, des profils qui ont du mal à un logement. Dans un contexte tendu au niveau de l'hébergement d'urgence, « si on vide un squat, on met à la rue des familles », souligne Roland, président de Droit au Logement 31. « Ce sont des personnes qui se sont là parce qu'elles ne pouvaient pas trouver de logement dans le secteur privé. »

La de la Haute-Garonne, contactée, n'a pas souhaité commenter étant donné la récente décision de justice.

Selon Utopia56 Toulouse, les expulsions de squats se multiplient ces derniers temps. À chaque fois, l'association tente de fournir des solutions d'urgence aux occupants en leur fournissant du matériel ou en installant des campements dans des zones tranquilles.

Aujourd'hui, l'association espère être prévenue à l'avance de l'expulsion du squat de Saint-Martin-du-Touch et que celle-ci se fera en douceur. Alors que l'expulsion a été ordonnée délai, la coordinatrice appelle les squatteurs à les contacter en cas d'évacuation pour bénéficier de leur soutien et pour savoir où les personnes iront et apporter un soutien matériel pendant l'évacuation.