Tour Poitou-Charentes 2023 : chaleur avantage grosses équipes, terreur petites

Lounes

Pour contrer la chaleur qui accable les coureurs lors de cette 37ᵉ édition du Tour Poitou-Charentes, les équipes différentes stratégies qui nécessitent des moyens. Cela souligne les inégalités entre les grandes et les petites structures.

C'est une véritable armée de cyclistes en sueur qui se présente au départ de la deuxième étape du Tour Poitou-Charentes, le mercredi 23 août. La raison de cette transpiration excessive chez les coureurs ? Une poche de glace, censée leur apporter un peu de fraîcheur lors de cette journée où les températures sont élevées. L'odeur de sueur qui émane des cyclistes à l'arrêt et exposés au soleil témoigne de leur inconfort. Valentin Ferron de l'équipe Total-Energies préfère attendre à l'ombre d'un arbre, devant une pharmacie indiquant une température de 32°C à 10h50. Certains cyclistes commencent déjà à boire leurs bidons et se passent des bouteilles d'eau fraîche. Ils consommeront près de deux litres d'eau par heure aujourd'hui. « La politique publique en cas de canicule consiste à ne pas faire d'effort violent, à rester au frais et à boire. Or, les cyclistes font exactement le contraire », souligne Paul Brousse, sélectionneur de l'équipe de France féminine et consultant pour France Télévisions sur le Tour Poitou-Charentes. « Du point de vue de la santé, ce n'est tout simplement pas bon, les médecins le disent. » La veille, après l'arrivée de l'étape, Axel Narbonne-Zuccarelli (Nice Métropole Côte d'Azur) reconnaissait la difficulté de courir dans de telles conditions météorologiques. « Au milieu de l'étape, je me demandais comment j'allais la finir, j'avais la qui tournait. » Une sensation normale lorsque la température corporelle des coureurs dépasse les 40°C.

« Il n'y a pas de solution miracle contre la chaleur : il faut rafraîchir les coureurs et éviter la déshydratation », explique Yvon Madiot, directeur sportif de l'équipe Groupama-FDJ et chef d'orchestre dans la lutte contre la surchauffe de ses coureurs. Il élabore son plan de bataille la veille, une fois les informations météorologiques en sa possession. Ses troupes ? Les assistants et les membres de son équipe. Leurs armes ? Des bidons remplis d'eau mélangée à une à base de sels minéraux et de glace. Cette dernière, sous forme de blocs ou de gilets, est une denrée rare que toutes les équipes s'arrachent. « Nous la commandons à l'hôtel », explique David Fouchet, assistant sportif de l'équipe Groupama-FDJ. « Nous devons également en acheter à côté. L'hôtelier se débrouille avec les fournisseurs et les fait venir jusqu'à nous. » Au sein de l'équipe française, dès 6h30 du matin, les assistants sont déjà à pied d'œuvre, « au frais » comme ils aiment à le dire, pour les 120 bidons. Ces munitions sont ensuite stockées dans les glacières des directeurs sportifs, mais surtout distribuées depuis le bord de la route à des endroits stratégiques.

Si le plan semble clair, il nécessite une véritable armée de l'ombre pour être mis en œuvre. « Sur un Tour de France, nous pouvons avoir huit coureurs et entre 35 et 40 membres du personnel », explique Paul Brousse. « En revanche, dans les petites équipes, elles sont moins nombreuses et ont moins de possibilités pour s'organiser et ravitailler les coureurs. » Pour cette deuxième étape du Tour Poitou-Charentes, les grandes équipes avaient prévu des arrêts toutes les 20 kilomètres, soit une bonne dizaine de points au total, alimentés par une flotte de véhicules. En revanche, chez les équipes plus modestes, seuls points de ravitaillement étaient au maximum. Une inégalité qui a un impact sur la forme et la santé des coureurs. « Oui, il y a des différences entre les équipes », admet volontiers Yvon Madiot devant le bus de l'équipe Groupama-FDJ. « Les coureurs des petites structures moins s'hydrater parce qu'il n'est pas évident pour eux d'aller chercher les bidons auprès de leur directeur sportif lorsque le peloton roule vite. Cela demande un effort supplémentaire et le coureur peut rencontrer des difficultés. »

Deux heures après le départ, quelques voitures sont stationnées à la sortie d'Allonne, en attendant le peloton. Cofidis, Arkéa-Samsic… Dans chacune de ces voitures, on trouve des glacières et des membres de l'équipe qui s'affairent. Olivier Feche, kinésithérapeute pour l'équipe Cofidis le soir et assistant le jour, termine de découper des bas en nylon dans lesquels il glisse des glaçons. À ce bloc de glace artisanal, sécurisé par un élastique, il ajoute trois bidons et des gels énergétiques. « Je vais me positionner quelques mètres plus haut, comme ça ils auront vu la voiture et seront prêts à récupérer leurs musettes », explique-t-il. Les musettes, ces petits sacs en toile dont on devine grâce à leur humidité le contenu. Une fois que les coureurs sont passés, les musettes qui n'ont pas trouvé preneur sont remises à l'abri dans les voitures de l'équipe, qui poursuivent tant bien que mal leur chemin jusqu'au prochain point de ravitaillement.

À la fin de la course, une nouvelle fois, la différence de traitement est flagrante. Les coureurs de l'équipe Caja-Rural Seguros RGA se pressent dans leur petit camping-car surchauffé avant de se diriger vers leur hôtel, qui est plutôt éloigné. « Idéalement, il faudrait que des membres de l'équipe soient à l'arrivée de l'étape, mais aussi que d'autres l'arrivée des coureurs à l'hôtel », souligne Paul Brousse. La qualité de la récupération en dépend. Et plus il fait chaud, plus elle est importante.